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Appétit de politique, Gérard Streiff

Il y a, dans le pays, un grand appétit de politique. Affirmer cela aujourd’hui n’a rien d’évident. Dites « politique » autour de vous, et on vous répondra le plus souvent impuissance, trahison, arrangements, combines et compagnie. Le sujet prête à rire. Et pourtant.

Les mêmes qui ricanent se montrent volontiers avides de comprendre le pourquoi du comment de la crise et cherchent les moyens de la surmonter. Ils étaient dix millions l’autre soir pour regarder le débat télévisé des cinq présidentiables. Ils sont nombreux dans les rassemblements et les manifestations. Ils se sont souvent mobilisés pour les primaires. Ils se montrent attentifs dans les réunions et autres meetings citoyens.

Ils se bousculent enfin en librairie pour acheter les derniers livres politiques.

Le magazine professionnel Livres Hebdo affirme que le livre politique s’est révélé comme l’une des trois locomotives de la croissance de l’édition, ce premier trimestre, au même titre que la jeunesse et le poche. « Une performance inhabituelle », dit la revue. Les essais de décryptage supplantent les romans.

On parle même de « déferlante ». Certes, on peut y trouver des incongruités

– comme cette Histoire amusée des promesses électorales, de 1848 à nos jours (Bruno Fuligni, chez Taillandier, 2017 – mais, pour l’essentiel, le lecteur demande du lourd, du grave, du sérieux. Car il y a de l’inquiétude dans l’air et le citoyen voudrait bien savoir comment tout ça va finir.

Les militants communistes, engagés dans la double campagne de l’élection présidentielle pour Jean-Luc Mélenchon et des législatives, en font régulièrement l’expérience. La brochure La France en commun se place facilement. L’ouvrage des frères Bocquet, Sans domicile fisc (Le Cherche midi, 2016), fait un carton. Le livre Front national, l’imposture. Droite, le danger de Pierre Laurent, Alain Hayot et Marc Brynhole (les éditions de l’Atelier, 2017) connaît un très réel succès et suscite partout des débats passionnés. On avait un peu connu cette même envie de savoir, de disposer de tous les éléments, lors de la bataille contre le traité européen.

Comment cet intérêt se manifestera dans les urnes ? Est-ce qu’il se traduira par une participation massive à l’élection ? Est-ce qu’il fera baisser l’abstention si massive ces dernières années ? Bien malin qui le dira.

S’il y a envie de politique, et de débat, et de confrontation, le spectacle qui est le plus souvent donné est décevant. C’est une passion contrariée que vivent bien des Français. La campagne est fluctuante, les « coups de com » remplacent l’argumentation de fond, le sensationnel efface la réflexion.

Bonne transition pour dire le bien que l’on pense du dossier Santé développé dans ce numéro. Le diagnostic qu’il porte sur le pays indique qu’on n’est pas loin du « crash ». Cela vaut pour la réalité sanitaire mais on pourrait en dire autant de l’école, du travail, de la justice, de la jeunesse, etc. Dans le même temps, le dossier montre à quel niveau d’exigence il faut se placer pour changer vraiment. Il souligne enfin que des forces existent pour travailler à une alternative, à condition de les rassembler efficacement.

Bref, s’il y a une envie de politique, il y a aussi besoin de politisation, d’un vaste effort de réflexion. Pierre Laurent, dans son rapport introductif, le 3 mars dernier, lors de la réunion du conseil national, mettait l’accent sur cet aspect : « Les élaborations, les positions du Parti communiste ont besoin, pour être des forces effectives qui contribuent à transformer la société, d’être connues des militants et appropriées par eux. »

Il a avancé des pistes qui concernent directement notre revue : « Nous entendons donner une place nouvelle dans notre dispositif à une revue du Parti communiste qui assure un rôle de diffusion de nos travaux, de confluence, de creuset. Dès l’université d’été 2017, à partir des acquis de La Revue du projet, enrichis d’objectifs nouveaux, nous lancerons une nouvelle revue, une revue-creuset où les communistes pourront trouver les réflexions du parti et les discuter, une revue qui nous aide à instruire des débats et à explorer des thèmes que nous pratiquons peu encore, une nouvelle revue politique du PCF au beau nom de Cause commune. » Belle aventure en perspective. Notre directeur Guillaume Roubaud-Quashie vous en dira un peu plus dans le prochain numéro de juin.  n

Gérard Streiff
Rédacteur en chef de La Revue du projet

La Revue du projet, n°66/67 avril-mai 2017

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Appétit de politique, Gérard Streiff

le 28 April 2017

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