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Jusqu'où l'État doit-il garantir à chacune et chacun la maîtrise de son corps ? Laurence Cohen*

La maîtrise de son corps induit la liberté de choisir. Maîtriser son corps, c’est avoir accès aux mêmes droits quels que soient son origine sociale, son lieu de naissance, sa culture, ses croyances religieuses…

De quels choix parle-t-on dans une société capitaliste où les inégalités vont en se creusant, où tout est marchandise ? De quels choix parle-t-on dans une société patriarcale où on assiste à une montée des intégrismes religieux et à une recrudescence des thèses réactionnaires qui cantonnent les femmes dans un rôle de procréation ?

Quelle peut être ou doit être l’intervention de l’État pour garantir ce droit alors que l’on touche à l’intime ? La question qui nous est posée n’est-elle pas celle de savoir si l’État est protecteur, garant des mêmes droits pour chacune et chacun ou inquisiteur et moraliste ?

Droit à l’interruption volontaire de grossesse et contraception
L’égalité et la liberté des femmes sont au cœur de ce questionnement. Dans les années 1970, des femmes se sont battues pour rendre effectif ce beau slogan : « un enfant si je veux, quand je veux ». Aujourd’hui, où en est-on ? En France et en Europe, on assiste à des reculs inquiétants. En Irlande, en Pologne, à Chypre et à Malte, les femmes n’ont pas le droit à l’avortement. Et c’est au tour du gouvernement espagnol de remettre en cause ce droit, revenant à l’ère franquiste.
La France n’échappe pas à ces mouvements, avec ici aussi une offensive des forces les plus conservatrices contre l’interruption volontaire de grossesse, parmi lesquelles le Front national qui préconise le non-remboursement de celui-ci. Hélas la casse de la santé par les gouvernements successifs est une catastrophe pour les femmes. Ainsi, les centres d’interruption volontaire de grossesse ont été particulièrement la cible de la loi HP-ST, appelée plus communément loi Bachelot. Le Haut conseil à l’égalité vient lui-même de le dénoncer dans un rapport de novembre 2013 en indiquant qu’en 10 ans, 130 centres ont été fermés. Car, faute de structures suffisantes, il devient de plus en plus difficile d’obtenir un rendez-vous respectant le délai légal pour pratiquer une IVG. Ironie du sort, ces femmes se rendaient jusqu’à présent en Espagne pour pallier les insuffisances françaises…

Avoir recours à l’avortement est une rude épreuve pour toute femme et cette question ne peut être déconnectée de celle de la contraception. Une contraception libre et gratuite, quand des milliers de femmes n’y ont plus accès du fait d’une précarité galopante.

Commerce du corps
Un autre débat agite beaucoup la place publique en ce moment, celui de la gestation pour autrui (GPA) : peut-on dire, que cela s’apparente au respect ou au choix de maîtriser son corps ? Encore une vision déformée des femmes, objet du désir d’enfant comme objet sexuel. Les femmes sont encore trop regardées par le prisme de la procréation où celui du rapport marchand. La GPA ou « technique des mères porteuses », c’est-à-dire le fait de porter un enfant conçu par d’autres, revient à louer le ventre des femmes. Commerce juteux où les plus pauvres deviennent des proies faciles.

Tout comme la prostitution. Maîtriser son corps, est-ce à dire qu’on peut le louer ? Le vendre ? Où sont les limites quand le corps des femmes peut rapporter gros ? Ainsi, le système prostitutionnel rapporte trente-deux milliards d’euros par an dans le monde et trois milliards d’euros en France. Dans cette société ultralibérale et patriarcale, ce système constitue une violence inouïe, nourri par le phénomène de la traite des femmes les plus vulnérables. Comment parler de liberté de choix face à des rapports sexuels tarifés ? La prostitution n’est pas un métier, n’en déplaisent à ceux qui voudraient la réglementer. Il est temps que la France, pays abolitionniste, prenne des mesures en conformité avec cet engagement.

Le corps des femmes ne doit plus être un champ de bataille, l’État doit se doter de moyens financiers, humains, d’une politique de prévention et de répression pour éradiquer le fléau que constituent les violences faites aux femmes.

Je prendrai, enfin, un autre exemple, pour dénoncer le danger, dans le système socio-économique actuel, de prétendre donner satisfaction à tout à chacun, au nom de la liberté de maîtriser son corps : le recours à des aidants sexuels pour les personnes handicapées. Sur le terrain de la réduction des inégalités, de l’exigence des mêmes droits pour toutes et tous, il s’agit donc de satisfaire à tout prix le désir réel ou supposé de la personne handicapée, sans penser aux conséquences de cette demande auprès de celles et ceux qui devront assouvir ces désirs. C’est une mauvaise réponse à un vrai problème, comme le souligne l’association « Femmes pour le dire, femmes pour agir ». Assistant sexuel, ou plus majoritairement assistante sexuelle, ne peut être un métier !
En résumé, maîtriser son corps n’est pas seulement un choix individuel, il dépend de la mise en œuvre de politiques publiques. L’intervention de l’État est donc indispensable pour à la fois permettre à la loi de définir le cadre, d’ériger des limites, de poser des interdits mais également pour créer les conditions de réduire au maximum les inégalités, de combattre la précarité en améliorant et développant les services publics. Mais la responsabilité de l’État est engagée également pour faire évoluer les mentalités par un travail d’éducation, de sensibilisation et de prévention.
Vivre ensemble, dans le respect de l’autre, libres et égales, est un enjeu décisif du XXIe siècle que l’État doit relever avec audace et détermination. 

*Laurence Cohen est responsable du secteur Droits des femmes / Féminisme du Conseil national
du PCF. Elle est sénatrice
du Val-de-Marne.

La Revue du projet, n° 38, juin 2014
 

Il y a actuellement 1 réactions

  • husan01

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    Par husan01, le 26 septembre 2014 à 07:41.

 

Jusqu'où l'État doit-il garantir à chacune et chacun la maîtrise de son corps ? Laurence Cohen*

le 10 juin 2014

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