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Les habitants des quartiers populaires, variables d’ajustement de la crise économique ? Michaël Orand

Le rapport 2013 de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS), remis en décembre dernier, livre une vision alarmante des conséquences de la crise sur ces territoires. Les ZUS sont des quartiers urbains concentrant des difficultés économiques et sociales. Elles correspondent aux quartiers de grands ensembles ou aux centres urbains dégradés, et recouvrent en grande partie les quartiers dits sensibles des banlieues des grandes agglomérations. Alors que la situation semblait relativement stable sur le moyen terme, elle s’est dégradée subitement sur les toutes dernières années. Les inégalités entre ces zones et le reste des agglomérations dans lesquelles elles se trouvent se creusent ainsi de plus en plus.

En matière de revenus par exemple, alors que le revenu par unité de consommation croît d’environ 1 % sur l’ensemble de la France métropolitaine entre 2009 et 2010, il a stagné dans les ZUS. Il en résulte un taux de pauvreté toujours plus important, puisqu’en 2010, plus d’un habitant de ZUS sur trois (36,1 %) vivait en dessous du seuil de pauvreté, soit trois fois plus que dans le reste des agglomérations.

Sur la question de l’emploi, la situation est tout aussi préoccupante, puisque le décrochage des ZUS par rapport au reste des territoires urbains, amorcé en 2009, se poursuit (voir le graphique). En effet, depuis 2009, le taux de chômage dans les quartiers hors ZUS des unités urbaines est relativement stable, autour de 9,5 %. Dans le même temps, le taux de chômage en ZUS n’a cessé d’augmenter, passant de 18,5 % des actifs en 2009 à 24,2 % en 2012, soit une augmentation de 30 %. En 2012, un actif sur quatre vivant en ZUS était donc au chômage. À cette aggravation du chômage vient par ailleurs s’ajouter une baisse sensible du taux d’activité. Au total, 14,7 % des habitants de ZUS ayant entre 15 et 64 ans sont au chômage, contre 7 % pour les habitants des autres quartiers des agglomérations.

 

L’intérêt de ce rapport 2013 de l’ONZUS, c’est qu’il permet d’analyser les conséquences de la crise économique de 2008 sur les différentes classes sociales, et pas seulement à des niveaux nationaux agrégés. Ce que l’on constate, en particulier dans le domaine de l’emploi, c’est bien que les habitants des ZUS sont les premières victimes de cette crise, alors que le reste des Français semble relativement épargné. On savait déjà que lors de crises, c’est ceux qui sont dans les situations déjà les plus précaires qui subissent les effets les plus importants, puisqu’ils sont les variables d’ajustement les plus accessibles. Mais la persistance d’un effet concentré principalement sur les classes populaires, d’une ampleur jamais vue, et qui plus est sur une période relativement longue en regard du cycle économique, est un élément nouveau : il devrait nous alerter sur la nécessité d’agir en urgence pour les habitants des quartiers populaires, malheureusement souvent délaissés par les pouvoirs publics. L’annonce de l’installation prochaine d’une agence Pôle Emploi dans la ville de Clichy-sous-Bois semble malheureusement arriver un peu tard au regard du désengagement chronique de l’État durant les quinze dernières années. Elle ne marque pas véritablement l’amorce d’une politique volontariste en faveur de ces quartiers.

La Revue du projet, n° 34, février 2014
 

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Les habitants des quartiers populaires, variables d’ajustement de la crise économique ? Michaël Orand

le 15 February 2014

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