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Rompre avec les fondations capitalistes de l'actuelle Union européenne, Patrick Le Hyaric

Député européen et directeur de l'Humanité, Patrick Le Hyaric est en charge du projet européen du PCF. Il revient pour La Revue du projet sur le texte adopté par la convention nationale qui s'est tenue place du Colonel Fabien le 16 novembre. Un document de référence pour les communistes en vue de la bataille des européennes de mai 2014.

Pour quelles raisons le PCF a-t-il décidé de réunir une convention nationale sur son projet pour l'Europe ?
Patrick Le Hyaric : Alors que la crise prend une telle ampleur, avec ses drames humains, jusqu’à devenir une crise de sens, une crise de civilisation et tandis que tant de doutes, de critiques, voire de rejets s’expriment à l’égard de l’actuelle construction européenne, il nous est apparu nécessaire d'examiner, comme force communiste, les conditions nouvelles de notre action en faveur de la refondation de la construction européenne.
C'est urgent ! Car l’idée même de projet européen est entrée en crise au point de susciter sur tout le continent des sentiments de rejet et de repli, terreau sur lequel les nationalismes, et les extrêmes-droites se développent. Nous qui nous situons sur le terrain d'une profonde transformation de ce qui existe, conscients que seules les mobilisations populaires y parviendront, nous avons tout naturellement pour ambition de mettre à la disposition de nos concitoyens des idées, des analyses nouvelles, des éléments de perspectives visant à rompre nettement avec les fondations capitalistes de l’actuelle Union européenne.
C’est le sens de notre appel pour enclencher partout un processus unitaire pour refonder l’Europe.

Le texte prend position en faveur d'une union de nations et de peuples souverains et associés, que cela signifie-t-il concrètement ?
Notre proposition vise à faire vivre les souverainetés populaires et une construction européenne coopérative et solidaire. Une « union » nouvelle ne devrait pas chercher à reproduire à l’échelle européenne la structure d’un État national. Nous récusons le projet actuel mis sur la table par Mme Merkel d’un fédéralisme centralisateur et autoritaire. Nous mettons en débat le projet d’un nouveau cadre à créer ensemble. Celui d’une union des nations et des peuples souverains et associés.
C’est un parti pris en faveur d’une conception souple et diversifiée de la construction européenne dont le but n’est pas de diminuer le degré de coopération entre ses membres mais de renforcer l’engagement solidaire de chaque peuple et de chaque nation qui, selon nous, sera d’autant plus important qu’ils auront choisi librement le cadre et la finalité.
Ensuite, ce concept vise à donner un souffle démocratique, avec un va-et-vient permanent entre les citoyens et les parlements européens et nationaux, dans l'élaboration des lois, leur mise en œuvre et leur évaluation.

Vous dénoncez la soumission de la Banque centrale européenne aux intérêts financiers mais vous n'appelez pas à une sortie de l'Europe, n'est-ce pas contradictoire ?
La profondeur de la crise appelle de rompre avec le programme commun ultralibéral de la Commission de Bruxelles, de la Banque centrale européenne et du Fonds monétaire international et de s’appuyer sur une nouvelle démarche de solidarité, de mise en commun pour affronter les grands défis de l’heure, qu’il s’agisse de l’environnement, de l'emploi, de l'énergie, des transports ou encore de la nutrition et de l’eau.
Le mouvement progressiste ne doit pas laisser le champ libre à un affrontement réduit entre les tenants d’une fuite en avant libéro-fédéraliste et ceux qui prônent le repli national, laissant les peuples sous la domination des rapaces de la finance. Il n’y a pas d’autre issue efficace que d’aider à la construction d’un processus de luttes et de modification du rapport de forces politiques, en vue d’une refondation démocratique, sociale, écologique de la construction européenne. Dans ce cadre, la Banque centrale européenne doit assurer une mission de service public en faveur de l’emploi et du développement humain durable, ce qui suppose bien sûr une modification de ses statuts et que son action soit contrôlée par le parlement européen. Nous avons d’ailleurs le projet innovant d’un fonds européen pour le développement humain, social et écologique ainsi que pour de nouveaux services publics. Nous menons un double combat pour un euro de coopération, favorable à l'investissement et à l’emploi et pour une monnaie commune mondiale de coopération se substituant à l'hégémonie actuelle du dollar.  
 
À quoi ressemblerait la politique agricole commune refondée que vous souhaitez voir émerger ?
D’abord une nouvelle politique agricole commune viserait à assurer un revenu décent à toutes les agricultrices et tous les agriculteurs, par la mise en place de prix de base garantis pour une quantité donnée de production. Les aides publiques seraient modulées et plafonnées. Elles compenseraient les chutes de revenus, les handicaps naturels, les problèmes climatiques. Les volumes de production seraient régulés et correctement répartis. Des systèmes de visas environnementaux et sociaux, aux frontières, permettraient de combattre le libre-échange intégral et alimenteraient un fonds mondial de solidarité pour permettre aux pays en développement d’accéder à des progrès sociaux et à des dispositions agro-environnementales. Un long processus de transformation pour l’emploi, la vie des territoires et la transition environnementale de certaines productions agricoles, doit être engagé sans attendre pour tenir compte des changements climatiques, se soucier d’une gestion durable des ressources agricoles, à commencer par les sols et l’eau.
Fondamentalement, l'agriculture et les agriculteurs ont besoin de respect et de reconnaissance pour mener à bien les transformations qu'appelle leur activité, indispensable à la vie des hommes et à la préservation de la nature.  

Quel rôle international souhaitez-vous voir jouer à cette Europe refondée ?
Elle doit jouer un rôle actif pour solidariser les peuples, au lieu de pousser les feux de la loi de la jungle de la concurrence. Elle doit être un partenaire actif pour l’ensemble des pays en voie de développement. Elle agirait en toute indépendance vis-à-vis des États-Unis, mais aussi de la finance et des multinationales. Elle ferait des propositions pour une nouvelle Organisation mondiale du commerce. Elle se donnerait les moyens d’obtenir des décisions positives dans les grandes conférences comme celle sur le climat, dans l’action contre la faim dans le monde ou encore en faveur du désarmement et de l'éradication des armes nucléaires et chimiques. Elle mettrait fin immédiatement au projet de marché unique transatlantique. Elle cesserait de s’insérer dans l’OTAN et ferait progresser l’exigence d’une dissolution de cette structure. Elle contribuerait de toutes ses forces à la résolution du drame de notre époque, celui que vit le peuple palestinien, privé du droit légitime de disposer d'un État.

Quelle place le nouveau projet européen du PCF prendra-t-il dans la campagne du Front de gauche aux élections européennes ?
Ce document, issu d’un long travail pour lequel ont été consultés des responsables associatifs, des syndicalistes est destiné à être mis à la disposition du débat de tous les individus, de toutes les forces qui souhaitent changer profondément la construction européenne.
Il est évidemment à la disposition de la poursuite du travail au sein du Front de gauche qui, rappelons-le, est né de la dernière campagne des élections européennes.

Quelles forces en Europe sont disponibles selon vous pour porter des objectifs semblables à ceux du PCF, comment les rassembler et agir avec elles ?
Nous ne demandons pas un ralliement à ce projet. Nous le mettons à disposition d’un débat de refondation. Les mouvements sociaux des travailleurs, des jeunes, sont très importants dans tous les pays d’Europe.
Avec le Parti de la gauche européenne, nous proposons de construire un forum permanent européen des alternatives. Il s’agirait d’une structure souple, ouverte large, où se retrouveraient des forces politiques, syndicales, sociales, associatives qui rejettent l’austérité et recherchent des issues progressistes à la crise actuelle.
Partout, nous voulons favoriser l’intervention populaire majoritaire pour des mouvements, un processus unitaire de rupture avec l’Europe capitaliste et des axes de refondation progressiste.

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Rompre avec les fondations capitalistes de l'actuelle Union européenne, Patrick Le Hyaric

le 05 janvier 2014

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