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Des propositions insuffisantes pour le logement, Catherine Peyge*

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Trop consensuelles, les propositions socialistes ne sauraient suffire à répondre à l’ampleur d’une crise qui frappe plus de 8 millions de Françaises et de Français1.

Présentées aux pages 25 et 26 du projet, les propositions en matière de logement sont résumées dans la proposition n°12. Le parti socialiste souhaite ainsi « stopper l’envolée des loyers » et financer la « construction de 150 000 logements sociaux », un chiffre conforme aux préconisations du rapport de la fondation Abbé Pierre.Si nous pouvons souscrire au constat présenté et aux objectifs fixés, les propositions restent insuffisantes pour répondre à l’urgence de la crise actuelle. La pénurie de logements, conjuguée à la cherté croissante des prix du logement, continue de créer les conditions d’une augmentation régulière du nombre de mal-logés en France. Elle impose aujourd’hui des propositions de rupture.La situation que nous vivons n’est pas le fruit du hasard mais bien le résultat des politiques menées par la droite ces dernières années. En effet, la dépense publique pour le logement s’est progressivement orientée vers les dispositifs de défiscalisation qui profitent aux ménages aisés (15 milliards d’euros en 2009). Loin d’aider à résorber la crise, cette déformation voulue encourage une spéculation immobilière qui n’a fait qu’accentuer la crise. Or la volonté de réorienter considérablement la dépense publique vers le financement de logements sociaux n’est pas clairement affichée dans le projet socialiste. Par ailleurs, la proposition de modifier la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) en augmentant la part de logements sociaux à 25 % dans chaque ville ne s’accompagne d’aucun moyen nouveau de la faire appliquer. C’est pourquoi les élus communistes proposent de coupler l’augmentation du seuil (à 30 % dans les zones tendues) à la multiplication par 10 des pénalités en cas de non respect de la loi.

 

L’encadrement des loyers

 

Pour agir contre la cherté du logement, le parti socialiste se contente de vouloir contenir les augmentations futures des loyers (lors d’une première location ou d’un changement de bail) tandis que nous défendons l’idée d’un « encadrement réglementaire des loyers » qui permette d’agir sur des prix actuels déjà trop élevés2.Sur la question de l’encadrement des loyers, le projet du PS ne précise pas le dispositif choisi. Il indique seulement sa volonté de ne pas permettre des augmentations déconnectées de l’évolution des revenus des ménages au moment de la signature d’un nouveau bail et lors d’un changement de bail (d’un locataire à l’autre). Cette proposition n’aura donc aucun effet sur les loyers actuels qui ont atteint en Ile-de-France notamment (surtout sur les petites surfaces) des niveaux exorbitants. Voici ce que le texte du PS précise :« Nous mettrons en place un encadrement des loyers lors de la première location ou à la relocation dans les zones de spéculation immobilière, pour que les augmentations entre deux locataires ne soient pas déconnectées de l’évolution des revenus de ménages. Les propriétaires seront tenus de souscrire une garantie contre les impayés de loyer, évitant au candidat à un logement d’apporter une caution personnelle. »

L’encadrement règlementaire des loyers proposé par les élus communistes dans la proposition de loi du 30 mars 2011 établissant un programme d’urgence pour le logement et de lutte contre la spéculation immobilière se trouve dans le texte ci-dessous en italique. Il s’agit de prendre un arrêté annuel pour fixer un prix applicable selon la catégorie du bien, sa qualité énergétique, sa salubrité et son éloignement des services publics. C’est la première différence : les critères fixant le prix à respecter sont multiples et vont au-delà de l’évolution du revenu moyen des ménages (proposition du PS).Même si la proposition de loi ne le précise pas, il paraît indispensable de proposer un dispositif permettant d’agir sur les prix actuels. Cela peut se faire par une taxation très dissuasive (pouvant aller à 100 %) pour des propriétaires louant des biens dont le prix au mètre carré est supérieur à un certain montant. Le PS ne propose pas de mesure de ce type.  I. – Avant l’article 1752 du code civil, est inséré un article 1752 A ainsi rédigé :« Art. 1752 A. – À l’exception du contrat à bail passé par un organisme d’habitation à loyer modéré, le contrat de bail à louer d’un bien immobilier à usage d’habitation est réputé nul et non signé s’il prévoit un prix supérieur ou inférieur au prix défini par arrêté applicable à la catégorie de ce bien sur le territoire sur lequel il se situe. Le contrat de bail à louer des biens immobiliers à usage d’habitation ne peut prévoir un prix supérieur ou inférieur au prix défini par arrêté qui lui est applicable. Ce prix vise à garantir un droit effectif au logement. « Un arrêté du représentant de l’État, dans des conditions définies annuellement par un arrêté du ministre en charge du logement, détermine chaque année par quartier ou, dans les communes de moins de 80 000 habitants qui n’en comptent pas, sur le territoire de chaque commune, le prix mentionné à l’alinéa précédent. « L’arrêté sus-mentionné du ministre en charge du logement fixe, pour chaque région, un prix minimal et un prix maximal applicables à chaque catégorie de logement. Il fixe également les taux de modulation maxima applicables à ces prix en fonction de la qualité énergétique et de la salubrité de ce logement ainsi que de son éloignement d’un service public. »Enfin, il est à noter que plusieurs questions centrales sont absentes des propositions socialistes ou seulement mentionnées de manière allusive. Les expulsions locatives, qui sont la conséquence directe de la crise et son expression la plus violente, ne sont même pas évoquées, tout comme le nécessaire renforcement de la loi relative au droit au logement opposable (DALO). C’est également le cas du 1 % logement et de la lutte contre l’habitat indigne et les marchands de sommeil.Condition sine qua non d’une vie sociale et familiale stable, le logement doit devenir un des thèmes majeurs de l’élection présidentielle de 2012. Trop consensuelles, les propositions socialistes ne sauraient suffire à répondre à l’ampleur d’une crise qui frappe plus de 8 millions de Françaises et de Français3.

1) Selon le rapport 2011 de la fondation Abbé Pierre, 8,2 millions sont en situation de mal logement ou de fragilité et de précarité en matière de logement.

2) En Île-de-France, la part du revenu des ménages consacrée au logement a atteint 38  %.

 

3) Selon le rapport 2011 de la fondation Abbé Pierre, 8,2 millions sont en situation de mal logement ou de fragilité et de précarité en matière de logement.

 

*Catherine Peyge, maire de Bobigny, responsable PCF du droit à la ville, logement.

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le 17 May 2011

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