L’opinion rêve d’un autre type d’entreprise. C’est le MEDEF qui nous le montre, bien involontairement sans doute. Le syndicat patronal en effet a commandé à l’Institut Viavoice une enquête sur l’entreprise. S’attendait-il à un satisfecit pour son système, à une empathie pour l’entreprise libérale ? Fatale erreur. Les sondés ont massivement une image critique de l’entreprise actuelle – et donc du capitalisme – et une vision de l’entreprise – et de l’économie – de demain assez précise.
L’enquête, réalisée au printemps dernier, s’intitulait « L’économie et des entreprises de demain ». D’emblée, elle traduit ce que le président de Viavoice, François Miquet-Marty, appelle prudemment une « dualité d’image. […] L’image dominante des entreprises demeure très binaire en France.»
En clair, si l’opinion a une vision positive du progrès technologique (66%) ou des créateurs d’entreprises (64%), elle apprécie très modérément les patrons (35%) et ne voit pas d’un bon œil le profit (26 %) ni le management. Et surtout, elle se montre très critique de la finance (9 % de bonnes opinions!), un discrédit que l’on retrouve à propos du fonctionnement du capitalisme (8 % de bonnes opinions).
La critique de la dérive financière des entreprises vient très fortement dans l’enquête. « Si l’objectif de performance financière des entreprises est bien connu, note François Miquet-Marty, celui-ci est souvent décrié dès lors qu’il est perçu comme la principale raison d’être des entreprises ». La financiarisation de l’économie est en fait massivement rejetée. 84 % des sondés, chiffre record, estiment que les entreprises devraient davantage montrer que leur stratégie n’est pas uniquement financière mais comprend une vision à plus long terme. Pour 80 %, la finance doit être au service du projet d’entreprise et non l’inverse. Critique de la finance, donc, critique du système économique également et de ses finalités. 38 % des sondés estiment que les dérives du système économique sont déclenchées par l’obsession de la performance au détriment de l’utilité et pour 37 %, c’est « le manque de prise en compte de l’humain dans les préoccupations de l’entreprise » qui explique ces dérives.
La Revue du projet, n° 61, novembre 2016
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