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30 ans d’Humanité. Ce que je n’ai pas eu le temps de vous dire, José Fort

Ed. Arcane 17.

Par Irène Theroux

 

José Fort, pour des dizaines de milliers de jeunes, c’est d’abord une voix : celle qui retentit longtemps au début du meeting central de la fête de l’Humanité. Le petit ouvrage qu’il publie leur apprendra que José Fort, c’est plus encore une plume.
Né en plein cœur du tumultueux XXe siècle d’une mère espagnole, infirmière au service des Brigades internationales, et d’un père volontaire français dans lesdites brigades – engagement qui lui coûte la vue, définitivement –, notre jeune homme est amené à croiser à la table familiale des figures de tout premier plan du communisme espagnol, à commencer par la Pasionaria. Passé entre les mains de quelques professeurs communistes de haut vol au lycée Jacques-Decour à Paris (Charles Fourniau notamment), il s’engage tôt aux JC et se fait journaliste puis directeur politique de l’Avant-Garde – l’organe des JC – dans la première moitié des années 1970. Mais c’est à l’Humanité qu’il s’illustrera des décennies durant, notamment comme chef de la rubrique internationale.
C’est ainsi à une plongée dans les tumultueuses années 1970-1990 que nous invite notre homme, en cinquante textes alertes, menant des rêves cubains au drame palestinien, en passant par le Chili, le Liban ou la RDA. Derrière les anecdotes qui parsèment l’ouvrage et lui donnent son charme léger, ce sont des hommes et des femmes qui sont rendus à la vie et à la mémoire – aussi variés que le rédacteur en chef de1958 à 1985, René Andrieu (1920-1998), le chef de la rubrique internationale de 1963 à 1982, Yves Moreau (1917-2014), le secrétaire général de la rédaction Henri Alleg (1921-2013), le syndicaliste espagnol Marcelino Camacho (1918-2010), le père du Che (1900-1987)… Ce sont des séquences historiques qui sont éclairées, incarnées, en France et dans maints points chauds du monde. Fraternellement préfacé par l’ancien directeur de l’Humanité, Roland Leroy, l’ouvrage propose des incursions dans ce qu’a pu être le quotidien de cette rédaction aussi prestigieuse que singulière. Parmi ses figures de proue, l’Humanité d’alors compte bien sûr un dessinateur extraordinaire, Wolinski. Une belle place lui est faite dans le livre mais celle-ci aurait dû être bien plus importante, car c’est bien un livre à quatre mains qui était envisagé, avant la tuerie…
Reste qu’à travers ce point d’observation privilégié, José Fort, seul donc, nous livre un regard sur l’histoire de notre monde en ce temps décisif marqué par les derniers feux puis l’effondrement des principales tentatives de dépassement du capitalisme au XXe siècle. Un détour léger et profond qui ravive la colère pour mieux assurer l’espoir, qui leste les luttes du présent d’une réflexion sur un passé qu’il ne s’agit ni d’effacer ni de caricaturer, mais de comprendre pour construire l’avenir.

La Revue du projet, n° 54, février 2016
 

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le 16 février 2016

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