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« Penser et lutter contre la guerre (xixe-xxe siècles) »

Cahiers d’Histoire – Revue d’histoire critique  
N° 127,  Avril - Juin 2015
Par Séverine Charret
En introduction du dossier central consacré au pacifisme, Anne Jollet ouvre de stimulantes pistes de réflexion sur la guerre d’aujourd’hui, ses formes et les difficultés du discours pacifiste. Elle précise également dans quelle actualité de la recherche historique s’inscrit ce dossier. Pour commencer, Gilles Manceron interroge la position de la Ligue des droits de l’homme alors que la guerre « contredit tous les principes auxquels elle est attachée ». Dans ce contexte, la ligne majoritaire de l’association est favorable à la « défense nationale » (plutôt qu’à « l’union sacrée »). Mais les débats, vifs, évoluent au fil du conflit. Des voix se font entendre contre la guerre au nom du droit ou d’une sensibilité antimilitariste et sociale. La responsabilité de l’Allemagne est discutée, ainsi que la nécessité d’un arbitrage international. Ces débats s’incarnent dans les figures de quelques responsables de la LDH – Victor Basch notamment – dont les parcours sont étudiés au-delà de la Première Guerre mondiale, jusque dans les années 1930 où un nouveau clivage oppose pacifistes et antimunichois. Autre organisation : la Ligue pacifiste (LP) créée en Égypte en 1935 pour faire face à la montée du fascisme. Didier Monciaud pose la question de son « égyptianité ». Alors que le noyau militant de la ligue est constitué d’étrangers, de « cosmopolites », de jeunes gens et femmes issus des élites éduquées, son activité se porte sur les questions internationales. Mais l’engagement d’une fraction plus jeune, plus radicale sur la question nationale égyptienne, contre la domination coloniale provoque des tensions et l’éclatement de la ligue en 1939. Emmanuel Naquet propose, quant à lui, une réflexion sur le rapport entre société civile, État et pacifisme. Si jusqu’en 1914, les pacifistes placent les puissances et la diplomatie au cœur de leur pensée avec les notions d’arbitrage international et de sécurité collective, progressivement, au tournant du siècle, et plus encore au lendemain du premier conflit mondial, ce sont des ONG qui cherchent à impliquer la société civile, les peuples. La défense des droits de l’homme passe alors par la dénonciation des exactions jusqu’à l’apparition d’un « droit d’ingérence » au-delà de la seule urgence humanitaire. Chloé Maurel dresse, elle, le portrait d’un individu : Otto Klineberg. Intellectuel, polyglotte, grand voyageur, il a mis ses connaissances disciplinaires, principalement en psychologie, au service de la paix. Ses recherches ont ainsi permis de déconstruire les préjugés racistes et les stéréotypes nationaux. Aux États-Unis, ses travaux servent le combat pour les droits civiques tandis qu’il œuvre, au sein de l’UNESCO notamment, pour une meilleure compréhension internationale autour de l’idée « qu’il n’y a rien dans la nature humaine […] qui rende la guerre inévitable. » Enfin Anne Geslin-Ferron montre que les fraternisations pendant la Première Guerre mondiale ont été des moments d’atténuation de la haine de l’autre. Les soldats ennemis, à la faveur de leur proximité dans les tranchées, découvrent qu’ils partagent les mêmes conditions de vie et souffrances. Cependant, cette empathie, connivence même, n’ont jamais remis en cause la volonté de se battre, le patriotisme. De plus, elles sont restées étrangères à la hiérarchie militaire, qui les sanctionne, et à l’arrière qui peut y voir une trahison. Toujours sur la Première Guerre mondiale, Sylvain Di Manno évoque l’importance de la météorologie pendant le conflit, en lien avec la nouvelle façon de faire la guerre (artillerie, aviation, gaz) et par conséquent la militarisation croissante de ses services. Sont aussi à l’honneur de ce numéro les historiens Maurice Agulhon et Christophe Charle ainsi que Christian Fiquet qui témoigne sur les réfractaires à la guerre d’Algérie et l’Action civique non violente.
La Revue du projet, n°50, septembre 2015
 

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le 03 November 2015

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