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Baudouin, Wolfgang et nous, Guillaume Roubaud-Quashie*

L’été 2015 aura été marqué par de rudes et implacables offensives contre les peuples, en France comme en Europe. Loi Macron ici, diktat de destruction massive là-bas… Si le tout fut enrobé, comme à l’accoutumée, de miel et de mensonges, çà et là pointait la dent rapace des criminels de l’austérité – comment appeler autrement ceux qui organisent si méticuleusement la misère la plus terrible ?

Le coup fut si rude que le ministre des finances allemand, Wolfgang Schaüble, peina fort à faire passer sa symphonie tragique pour l’habituelle ritournelle du rigoureux père de famille. Si le maquillage de Macron fut assurément plus résistant, qui voulait bien lire les Échos le 13 juillet pouvait trouver levé le voile de sirupeuse hypocrisie (façon « gagnant-gagnant », etc.). Un certain Baudouin de Moucheron – ça ne s’invente pas – venait dire que, le gigot Macron avalé, l’appétit patronal demeurait intact. Se penchant sur un des aspects les plus mesquins et ahurissants de la loi, le sieur de Moucheron en pointait les insupportables limites. Pensez donc ! Si la loi Macron prive les salariés de leurs indemnités de licenciement complètes – ben oui, si on ne peut plus virer les gens comme on veut sans avoir à payer quand on viole le droit du travail… –, elle ne s’y résout pas pour certains cas de figure. Et l’ami Baudouin d’en dresser une petite liste : « pour les licenciements avec harcèlement moral, harcèlement sexuel, les licenciements discriminatoires, les licenciements violant certaines protections, comme la maternité, l’accident du travail, etc. » Pleutre de Macron ! Il n’a même pas osé amputer les indemnités de licenciement pour harcèlement sexuel. Alors qu’entre nous, Baudouin, hein ? Et notre ami de conclure, désolé que soient encore un peu bouchées ces voies qui nous libéreraient du chômage et nous feraient entrer de plain-pied dans la modernité compétitive : « Le Code du travail, ainsi amendé, rend toujours possible ces situations difficilement compréhensibles pour un employeur, conduisant à indemniser de plusieurs années un salarié […] lorsqu’un licenciement est jugé injustifié ou mal justifié. Comment alors rassurer concrètement les entreprises sur l’adaptation du droit du travail à leur réalité concrète, […] si les règles en vigueur dissuadent le recours à l’emploi salarié ? » Après le gigot, on attend donc le fromage et le dessert, jusqu’à la dernière goutte.

Alléchés par l’odeur du profit, nos bons bergers ont tombé le masque et sorti les coutelas. Pas sûr que tout ait échappé à nos millions de concitoyens. Pas sûr même que ces événements n’aient pas ouvert en grand les yeux à quelques milliers, quelques dizaines de milliers de personnes – peut-être plus encore. Pour elles et pour eux, ce premier pas risque fort de faire surgir cette question : si ces gens sont porteurs d’un projet si inhumain et si organisés pour le faire triompher, que pouvons-nous faire, nous ?

C’est là que nous, communistes, devons être attentifs et offensifs pour ne pas laisser retomber cette lucidité mieux partagée en désespoir découragé. Le lancement de La France en commun. Invitation à écrire un projet d’émancipation humaine arrive, de ce point de vue, parfaitement à son heure. Aller, toutes oreilles dehors, à la large rencontre des habitants du pays – bien au-delà des « habitués », si je puis dire – pour leur tenir un langage d’un autre possible immédiat, voilà une tâche qui tombe à point. Leur dire que ce possible humain n’est pas bréviaire à avaler en bloc mais projet à investir et partager. Leur dire aussi une décisive parole de vérité : rien ne se fera sans une massive intervention populaire, sans leur intervention ; rien ne se fera si ceux qui y ont intérêt ne s’organisent pas ensemble, syndicalement, politiquement. Croit-on vraiment que face à la coalition des Wolfgang, Baudouin et consorts on y arrivera avec 140 000 adhérents au Parti communiste français – certes, presque la première force militante à gauche ? Une analyse tranquille et sans esprit de chapelle le fait vite sauter aux yeux : il faut des centaines, des milliers, des milliers et des milliers d’adhésions au Parti communiste.

Soyons donc audacieux ; soyons ambitieux. Voyons loin et large car on n’a jamais fait de communistes qu’avec des non communistes… Allons voir tous azimuts notre peuple : discutons, écoutons. Nous ne manquerons pas de renforcer le Parti communiste de la 6e puissance mondiale. À l’heure où le rapport de forces se montre dans sa violence nue, chaque pas ici vaudra aussi ailleurs. Face aux Baudouin, il ne sera pas de trop.

*Guillaume Roubaud-Quashie,
rédacteur en chef

La Revue du projet, n° 49, septembre 2015
 

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le 02 septembre 2015

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