La revue du projet

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Pour une république citoyenne et solidaire, Jean-Jacques Paris*

Les attaques frontales que subissent les collectivités locales les privent progressivement des marges de manœuvres nécessaires pour jouer pleinement leur rôle. Le projet des élus communistes et républicains consiste tout au contraire à consolider le couple commune/département pour garder ces leviers indispensables à la portée des citoyens et faciliter ainsi leur intervention sur le territoire

Faut-il rappeler le rôle primordial que tiennent les collectivités locales et les services publics qu’elles ont développés sans relâche, pour répondre autant que possible aux besoins individuels et collectifs croissants, qu’il s’agisse de mobilité, de social, d’éducatif, de culturel, de sportif, etc. Leurs investissements participent pleinement à l’activité des entreprises et de l’économie en général, source d’emplois, de revenus, et de croissance. Les attaques frontales qu’elles subissent tendent à les phagocyter, les privant progressivement des marges de manœuvre nécessaires pour jouer pleinement leur rôle. Leur libre administration est ainsi mise en cause par l’encadrement régressif de leurs recettes. S’y ajoutent les injonctions du gouvernement pour affaiblir et effacer les communes, la démocratie locale et de proximité. Il s’agit en fait de retailler les territoires à la mesure des exigences financières des opérateurs privés.

Abroger la réforme de 2010 des collectivités

 

Le projet des élus communistes et républicains consiste tout au contraire à consolider le couple commune/département pour garder ces leviers indispensables à la portée des citoyens et faciliter ainsi leur intervention sur le territoire où ils habitent, où ils travaillent, où ils vivent, où se concentrent toutes les questions, où peuvent se nouer les coopérations multiples pour y répondre dans l’intérêt général.À un autre niveau la région doit conserver un rôle majeur, en partenariat avec l’État qui doit affirmer son rôle de garant de l’équilibre entre les territoires et de l’égalité des citoyens. Dotée des moyens nécessaires, la région doit jouer un rôle économique et d’aménagement du territoire stimulant pour l’innovation industrielle et technologique ; les fonds régionaux pour l’emploi doivent servir de levier pour orienter l’argent vers un développement utile aux populations. Nous faisons nôtre le pacte pour un nouvel essor des services publics, pour développer leur champs et augmenter la place des représentants du peuple et des salariés pour garantir une gestion dans le sens de l’efficacité sociale.Une nouvelle phase de décentralisation dans une démarche constituante doit déboucher sur l’institution d’une VIe République, déprésidentialisée et démocratisée. Le partage des pouvoirs et des responsabilités doit être le moteur d’un essor considérable de la participation citoyenne.

En finir avec le cumul des mandats, en limiter le renouvellement, respecter la parité, introduire sous des formes appropriées la proportionnelle dans toutes les élections afin d’avoir une représentation fidèle du corps électoral. Créer des nouveaux domaines d’intervention populaire à tous les niveaux, y compris par voie de référendum. Améliorer les conditions d’exercice des élu(e)s en leur garantissant les moyens de participer et les protéger face à leurs employeurs sont des données indispensables pour redonner à la démocratie des animateurs nombreux et déterminés.

Il est en fait décisif d’instituer un rapport régulier entre les élus et les électeurs. La création de conseils de territoires pourrait y contribuer. Citoyens, élus, représentants syndicaux, des partis et des associations s’y retrouveraient régulièrement pour évaluer le travail accompli et envisager des projets d’avenir. En clair, la politique doit devenir pour un nombre beaucoup plus important de citoyennes et citoyens une des dimensions courantes de la vie sociale ne prenant qu’exceptionnellement et pour une durée déterminée le caractère d’une activité à plein temps. Le Front de Gauche doit permettre de mieux l’expérimenter et de le faire vivre.

Pleins pouvoirs aux citoyens

 

Il ne suffit pas d’apporter des adaptations à la marge, c’est la démocratie qui doit faire un bond qualitatif indispensable, plus ouverte sur la société, plus ouverte sur le monde, et surtout plus stimulante pour l’intervention des citoyens. Des États généraux pour une nouvelle république permettront un débat pluraliste et déboucheront sur une assemblée constituante. La nouvelle constitution ainsi élaborée sera soumise à référendum. La démocratisation de nos institutions nationales devra s’accompagner d’une action résolue de la France pour une modification radicale des institutions qui régissent le monde et l’Europe. Par exemple les pouvoirs du parlement européen doivent être renforcés. Il doit contrôler l’exécutif et la Banque centrale européenne. Les coopérations avec les parlements nationaux doivent se développer.Il faut démocratiser, débureaucratiser, déprésidentialiser les institutions à tous les niveaux en associant toujours mieux les citoyens et en assurant une transparence des choix et des raisons qui y mènent, comme leur évaluation. Cela passe par le développement des droits et des garanties statutaires des fonctionnaires qui sont les meilleurs remparts contre les modes de « gestion privés » et les plus sûrs points d’appui pour faciliter le contrôle des citoyens.

La démocratisation c’est aussi reconnaître au citoyen et aux collectivités locales des pouvoirs d’initiative, de débat public, de contrôle et d’évaluation de l’application des lois. Les collectivités territoriales doivent disposer des moyens nécessaires pour mettre les espaces, les outils, les personnels et la formation au service de la participation des citoyens. Pour y parvenir les collectivités territoriales doivent avoir un droit à l’expérimentation, elles le feront sous des formes diversifiées laissées à leur appréciation. Pour développer les droits, l’intervention des acteurs sociaux et des citoyens il est nécessaire d’instaurer des droits nouveaux pour les salariés dans les entreprises, celui par exemple de suspendre un plan de restructuration pour permettre l’élaboration de solutions alternatives.

De plus, le droit à la citoyenneté ne doit pas être fondé exclusivement sur la nationalité. Doit être reconnu citoyen celui qui choisit de vivre sur le sol français et qui doit ainsi pouvoir exercer son droit de vote.

Libre administration et autonomie financière des collectivités locales

 

Une collectivité doit pouvoir prendre en charge toute activité demandée par la population qui réside sur son territoire. Les décisions seront ainsi prises au plus près des besoins qu’elles visent à satisfaire, et donc des citoyens qu’elles concernent avec leur concours. Une collectivité plus étendue assurera la cohérence et la solidarité sur son territoire évitant ainsi les inégalités territoriales, et prendra en charge les activités que les collectivités locales moins étendues ne peuvent assumer.

L’autonomie des collectivités locales et leur coopération, piliers de la décentralisation, doivent permettre de résister à la logique de concurrence entre territoires. L’intercommunalité doit pouvoir prolonger l’action communale en se concentrant sur les seules actions d’intérêt communautaire. La création des structures intercommunales relève de la responsabilité exclusive des élus et des citoyens. Le principe d’autonomie financière des collectivités locales doit être garanti. C’est aux instances démocratiques de chaque collectivité de décider avec les citoyens des richesses à prélever sur son territoire et de l’utilisation qui en est faite.

Cependant le principe d’autonomie fiscale est ambiguë : le désengagement quasi-complet de l’État revient à imposer, comme seul élément de lutte contre les inégalités, des péréquations horizontales entre collectivités. Il est impératif d’avoir un cadre national de la fiscalité tout comme un mécanisme de péréquation vertical pour apporter des financements solidaires aux collectivités les plus démunies et bannir la concurrence entre territoires. Les ressources des collectivités locales doivent être repensées pour leur permettre d’assurer leurs missions et parvenir aux objectifs qu’elles se sont démocratiquement données. 

Ainsi les dotations de l’État doivent être améliorées, la fiscalité profondément remaniée vers plus de progressivité et le financement et le crédit réorientés vers les dépenses utiles. La fiscalité doit être transformée vers plus de justice et d’efficacité, en prenant en compte réellement les revenus et l’utilisation réelle des habitations. La contribution des entreprises doit être bonifiée en intégrant dans l’assiette les actifs financiers, le bilan réel en matière d’emplois et des salaires, de formation et d’investissements productifs. Dans le cadre d’une réforme globale du crédit et de la banque, un pôle financier public doit être mis en œuvre par la mise en réseau des institutions financières publiques et semi publiques mais aussi banques mutualistes et coopératives, et articulé avec des banques commerciales privées. Le pôle public permettra le financement du développement local et de l’emploi, il œuvrera à des coopérations avec les banques des autres pays de l’Union européenne et devra s’appuyer sur une banque centrale européenne dotée de nouvelles prérogatives sous contrôle du parlement européen.

Nous aurons l’occasion de porter ces propositions au débat dans les prochaines semaines, en particulier au sein des états généraux des élus locaux au Sénat, et dans les ateliers législatifs du front de gauche.

*Jean-Jacques Paris est secrétaire général de l’Association nationale des élus communistes et républicains.

 

La Revue du Projet, n° 11, octobre-novembre 2011

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Pour une république citoyenne et solidaire, Jean-Jacques Paris*

le 14 November 2011

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